Par Jorge Wejebe Cobo/ACN.
Aux premières heures du 27 février 1874, depuis une jetée de la baie de Santiago de Cuba, une troupe du bataillon espagnol de San Quintín est montée à bord d’un garde-côte qui a conduit les soldats à une crique des côtes de la Sierra Maestra où ils ont débarqué et ont entrepris, sans hésitation, la route directe vers le hameau de San Lorenzo, où ils ont fait irruption de manière surprenante, ne laissant à Carlos Manuel de Céspedes que l’alternative de vendre sa vie en face.
Se terminerait ainsi une série d’événements de l’armée espagnole à Cuba, qui a si précisément atteint le dernier retrait du Père de la Patrie, qui était enfermé depuis le 23 janvier, atteint de la vue, sans escorte, presque uniquement à cause de la perfidie de la Chambre des représentants qui, illégalement, sans le quorum requis, l’a destitué du poste de président sous l’accusation infondée de népotisme et de méthodes autoritaires et lui a interdit de quitter le pays.
L’histoire raconte que lorsque Céspedes reçut la communication officielle de sa destitution, il ne se hâta pas d’ouvrir l’enveloppe et invita gentiment à partager son petit déjeuner frugal avec le soldat messager, avec qui il s’entretenait comme des amis de longue date.
Mais ni cette trahison ni toutes les trahisons passées et les réparations de ses propres rangs ne purent briser l’homme que l’armée espagnole déshonorait en déshonorant ses drapeaux de noblesse, dont il se vantait, lui offrit la vie de son fils Oscar captif en échange de son abandon du combat, a répondu qu’Oscar n’était pas son fils unique, que tous ceux qui se battaient pour la patrie l’étaient. C’est par ce geste que fut justement nommé le Père de la Patrie.
La décision de l’homme qui conduisit un peuple esclave à briser plus de 300 ans d’oppression en ce glorieux 10 octobre 1868 ne pouvait être différente, et qui n’a pas renoncé quand d’autres ont cédé à la première défaite et en restant avec seulement 12 hommes, il s’est levé sur la chevauchée et a répondu avec force: "Non, il reste encore 12 hommes! Ils suffisent pour obtenir l’indépendance de Cuba".
C’est ainsi que commença la Guerre de Dix Ans (1868-1878) qui ne fut possible que par l’intrépidité et le courage de ce brave et qui donna naissance à l’Armée de libération, qui est devenu une école de chefs patriotes d’origine humble et brillante exécution militaire et une conduite morale irréprochable, et où la hiérarchie n’était atteinte que par l’intelligence et le courage sur le champ de bataille.
Mais aussi dans cette première mouvance surgiraient les maux qui frustreraient 10 années héroïques de guerre contre le pouvoir colonial par le manque d’unité, le caudillisme, le régionalisme, les pièges et les intrigues qui ont miné les rangs indépendantistes et qui ont réussi à ce que les Cubains en disant de José Marti laissent tomber l’épée, bien qu’ils ne soient pas vaincus. Le Père de la Patrie fut le premier obstacle à la claudication naissante qui conduirait à la trahison de Saint-Laurent.
Le dénouement du 27 février 1874 ne pouvait pas être autre, quand le Major Général de l’Armée Rebelle seul avec son revolver affronta plus d’une cinquantaine d’ennemis en déchargeant l’arme et en blessant certains, Mais en tentant d’échapper à l’encerclement, il fut abattu et, comme l’a dit un chroniqueur de son temps, "tomba dans un ravin comme un soleil de flammes qui s’enfonce dans un abîme".
Dans ce ravin de Saint-Laurent et dans tout Cuba, on vénère aujourd’hui la mémoire et l’exemple du Père de la Patrie, comme symbole de l’intransigeance révolutionnaire et comme rappel pour les générations actuelles et futures de révolutionnaires cubains de ce que signifie maintenir l’unité et la fidélité aux principes face aux embûches de l’ennemi. (Photo: Archive)