
Aurora Varona est ma maîtresse. Elle l’est, car il existe des sentiments qui restent toujours présents malgré les années et la mort, qui tentent de vous contrarier. Même si je n’entendrai plus jamais cette sorte de mot de passe affectueux que nous avions, personne ne pourra me retirer la tendresse de ce salut vibrant dans ma poitrine.
Elle, maîtresse d’école, comme on dit avec respect et admiration de ceux qui ont dédié leur vie à l’enseignement, était la maîtresse de son espace. Je ne me souviens pas d’une voix plus forte que la sienne, ni de quelqu’un qui ait essayé de saper ce contrôle strict sur tout ce qui se passait en classe.
Notre salle de classe était une confrérie martienne. Dès la porte d’entrée, où un vers de Martí nous accueillait jour après jour, de la cinquième à la sixième année, jusqu’à son exemple et sa sagesse, car Aurora a toujours agi guidée par le Soleil. Et même si elle ne nous a jamais caché les imperfections, elle nous a exigé d’apporter de la lumière. Peut-être que c’est à cause de ces contradictions de la vie qu’elle a regardé le Soleil une dernière fois le 25 octobre 2015, tandis que je poussais mon corps à la limite pour embrasser le Maître qui m’a appris à aimer.
À ses côtés, j’ai appris les mathématiques, les sciences et l’éducation professionnelle, fruit de cette douce vocation de Professeur Général Intégral (PGI) que sont les maîtres d’école. De plus, elle nous a appris à respecter et à valoriser la parole donnée, et sur la dignité ; oui, car ma maîtresse m’a également forgé des principes. Elle n’était pas seulement maîtresse d’école, elle était une maîtresse de vie.
J’ai une photo du dernier jour de classe où son regard, suivant mes pas, me révélait ce qui allait venir. Elle n’a jamais été loin de moi, elle a su pour les concours auxquels j’ai participé, pour mes notes au secondaire, pour les examens d’entrée à la Voie Professionnelle, pour la bourse, elle a partagé avec ma mère le moment de l’épreuve d’aptitude en journalisme et elle était présente le premier jour de l’université, ainsi que le dernier. Ensuite, elle frappait à ma porte pour me remercier (ma maîtresse pour me remercier moi !) d’un article publié, ou s’arrêtait dans la rue pour me signaler des détails sur un sujet que j’aurais pu inclure dans un autre.
Avec elle, j’ai appris à m’investir dans tout ce que je fais. C’est pourquoi je veux croire qu’au moment où je me lance dans cet art d’enseigner, que pour elle c’était de la grâce, elle m’accompagne chaque fois que j’entre dans la classe, et je sens le défi de transmettre à mes élèves tout ce que m’a appris mon Aurora. (Texte: Carmen Luisa Hernández Loredo / Collaboratrice Radio Cadena Agramonte) (Photo: Internet)