
États-Unis, 13 novembre - Rien de vraiment nouveau, ni même qui devrait faire l’objet d’une information, dans la politique de l’empire américain visant à influencer en faveur de ses intérêts les processus électoraux en Notre Amérique.
Cependant, jusqu’à présent, les responsables impliqués niaient généralement ces pratiques, inventant toutes sortes de prétextes ou manœuvrant pour manipuler subtilement l’opinion publique à ce sujet.
Mais avec l’administration Trump, cette sorte de doctrine s’affiche avec une totale impudence. Le président lui-même, avec son habituelle sincérité brutale, le fait tout le temps, abordé de manière substantielle, tout comme M. Rubio, menteur dans sa nature profonde, et si un doute subsistait encore, voici maintenant les déclarations du secrétaire du Trésor, M. Scott Bessent, un poste rarement utilisé pour parler de telles questions.
En effet, Bessent, en ligne avec Trump, a expliqué, lors d’une intervention, que l’aide de 20 milliards de dollars destinée à l’Argentine avait pour but de soutenir la récente victoire électorale de Milei et, en passant, de stimuler un effet domino pour d’autres scrutins dans la région. Dans cette narration, Milei est qualifié, de façon euphémistique, de « phare régional », ce qui est impressionnant.
Il est logique que le citoyen américain moyen, qui pourrait s’intéresser à cette « aide », ne comprenne pas qu’on donne de l’argent à Milei alors qu’il existe tant de besoins aux États-Unis, aggravés par la fermeture la plus longue de l’histoire du gouvernement. La réaction de rejet, dans la base trumpiste, a été notable, comme relayée par certains médias et leaders.
Pour tenter d’expliquer cette apparente contradiction, le secrétaire du Trésor a précisé que l’argent destiné à sauver Milei n’était pas un sauvetage, ce qui est évident, mais une sorte d’affaire selon laquelle les États-Unis gagneront plus qu’ils n’ont dépensé.
Si, au fond de sa réflexion labyrinthique, M. Bessent voulait faire comprendre que ce n’est pas une ingérence mais une aide aux amis du continent, il aurait été préférable de ne pas exposer clairement que ce dernier point n’est même pas vrai : soutenir Milei, c’est avant tout une lucrative opération financière pour l’empire, au détriment de l’avenir des Argentins.
Au-delà de l’aspect anecdotique de cette affaire, ce qui est important, c’est la manière dont cela révèle crûment la validité de ce qu’on appelle désormais la « doctrine Monroe économique », c’est-à-dire imposer un candidat en exerçant pression ou en promettant un avantage concret, sur le pays ciblé par cette manipulation. Pour reprendre une expression en vogue sous l’administration Trump : faire « la paix par la force économique ».
Ce chantage économique se manifeste lorsque Trump ressuscite ses tarifs douaniers absurdes, menace de supprimer une aide ou de réduire certains programmes migratoires.
Face à l’imminence des échéances électorales, il convient de souligner le cas du Chili, où la présidentielle est prévue pour le dimanche 16, et où la continuité d’un gouvernement progressiste est en jeu, ainsi que la situation électorale au Honduras, où sera élu un nouveau président le 30 novembre.
Le secrétaire du Trésor a évoqué le Chili, non pas comme un pays indépendant et souverain, mais comme une source importante de minerais, notamment de lithium (qui contrôle 40 % de la production mondiale), point de départ du conflit géopolitique entre les États-Unis et la Chine, qui aurait soumis le gouvernement chilien à un « accord rapace » afin de garantir un contrôle monopolistique sur ce minéral.
Soit José Antonio Kast, candidat néo-fasciste, qui revendique Pinochet, le dictateur assassin, et promeut une revente du pays aux transnationales américaines, soit le Chili sera soumis, au minimum, à une augmentation substantielle des tarifs douaniers et à d’autres sanctions sans justification, à l’image du Brésil, lorsque Trump a porté à 50 % les droits de douane contre ce pays, en réponse à la condamnation de Bolsonaro.
Dans le cas du Honduras, une rupture s’est aussi produite avec les États-Unis lorsque la présidente actuelle a décidé d’établir des relations complètes avec la République populaire de Chine, mais aussi en raison des positions souverainistes de son gouvernement sur la scène internationale.
La candidate du Parti Libre au pouvoir, Rixi Moncada, est sous pression : si elle remporte l’élection, ce qui est tout à fait mérité, les 75 000 Honduriens résidant aux États-Unis sous le statut TPS seraient immédiatement expulsés, impactant quasiment toute la population, puisque ces migrants honduriens représentent au moins 26 % des revenus en remises de fonds. À cela s’ajouteraient d’autres sanctions.
Pour clôturer ce tableau, il faut mentionner la Colombie, où la succession présidentielle est prévue pour mai 2026. Il va sans dire que le président Petro suscite une antipathie farouche à la Maison-Blanche, non seulement à cause de ses positions progressistes mais aussi parce qu’il apparaît clairement comme un obstacle majeur à toute implication de son pays dans un projet d’invasion contre le Venezuela.
Le parcours du très probable candidat d’un front unifié, Iván Cepeda, témoigne probablement de la hostilité de Washington, compte tenu de la trajectoire du sénateur actuel, issu du Pacte Historique. Les migraines que provoque Petro dans le secrétaire d’État, M. Rubio, semblent se prolonger à l’infini, voire se multiplier.
Même si c’est dans le passé, le cas de l’Équateur, qui a tenu un second tour en avril dernier, ressort aussi. Le gouvernement actuel bénéficie clairement du soutien intéressé de Washington, pour des raisons tant économiques que géopolitiques, étant un pays situé presque au centre de l’Amérique du Sud.
Une preuve : on parle déjà de rouvrir la base militaire américaine de Manta, celle que Correa avait fermée en 2009 dans un acte d’émancipation, ou même d’altérer les qualités archéologiques et touristiques de l’île de Galápagos, en y installant une base de marines américains prêts à attaquer leurs voisins. En échange, Washington promettrait des exemptions douanières.
Il est difficile de préciser dans quelle mesure une ingérence a eu lieu en Bolivie, où des erreurs – propres ou probablement induites – ont abouti à deux décennies de gouvernements de gauche, laissant place au retour d’une droite renouvelée, autoproclamée plus à droite que Trump lui-même, et prônant l’absurde idée d’un « capitalisme pour tous ».
Dans le cadre de cette analyse, il ne faut pas oublier les habituelles manœuvres des suspects habituels, les congressistes cubano-américains de Floride. Non seulement par l’accumulation de propos numériques de leurs assistants sur les réseaux sociaux, empreints d’un biais anti-cubain et ultra-droitier, contre le progressisme et la gauche au sud du Río Bravo.
La députée Salazar, allant jusqu’à se surpasser, a récemment envoyé une lettre au secrétaire Rubio, dénonçant le personnel diplomatique américain au Guatemala. Oui, comme on le lit ; ses ennemis de circonstance sont l’ambassadeur Tobin Bradley et le conseiller politique Daniel Fennell, nommés éventuellement par l’administration Biden.
Mme Salazar, représentante de l’État de Floride, où l’on dit qu’on lui demande la tête pour avoir abandonné ses électeurs sous la pression systémique de la police migratoire, a exprimé son rejet du soutien de l’ambassadeur Bradley aux candidats « libéraux » (à savoir la gauche radicale selon le trumpisme) pour une réforme future de l’actuel système judiciaire guatémaltèque. Elle l’accuse de s’immiscer dans les affaires intérieures du Guatemala.
Cela semble relever de la blague, venant de quelqu’un de la mafia cubano-américaine, celle qui mène la voix dans les menaces contre le Parti Libre du Honduras, pour ne citer qu’un exemple parmi un pays voisin. Et le plus insolite, c’est qu’elle publie la lettre envoyée à M. Rubio, ce qui prouve, une fois de plus, que la confession d’une partie fait souvent la preuve.
Dans cet univers absurde, il est pertinent de rappeler la législation américaine, qui interdit catégoriquement à un autre pays de s’immiscer dans ses processus électoraux.
Par exemple, la loi 1.52 USC/30121, ainsi que la 2.18 USC/611 et la 3.18 USC/595, précisent l’interdiction pour des tiers de financer ou d’intervenir dans le déroulement d’élections étrangères. Certaines de ces lois punissent avec jusqu’à cinq ans de prison et un million de dollars d’amende ceux qui commettent de tels délits. Les sanctions s’appliquent aussi bien aux individus qu’aux gouvernements étrangers.
D’un autre côté, il est important de souligner que cette forme d’ingérence impériale, intolérable même pour leur propre pays, relève aussi de la mise en œuvre de la Proclamation de l’Amérique latine et des Caraïbes comme zone de paix.
Il doit être clair, en définitive, que rejeter cette ingérence américaine n’est pas une question ou une position idéologique de gauche ou progressiste : c’est une réponse à une réalité que l’on sait permanente. La nouveauté, peut-être, c’est que les protagonistes de cette politique impériale en reconnaissent ouvertement la nature et l’exposent publiquement comme une chose normale. Ce cynisme manifeste offre ainsi une opportunité exceptionnelle pour la dénonciation et l’action politique visant à y faire face.(Texte et photo: Francisco Delgado / Cubasí)